Point chaud || RDC : quand la pauvreté des ménages contredit la croissance évoquée par Sama Lukonde
Heureux qui comme Sama Lukonde a fait un bon voyage, pour paraphraser le sonnet classique du poète français Joaquin du Bellay, « Heureux qui comme Ulysse… ».
Le premier des Warriors a regagné Kinshasa après avoir conduit la délégation congolaise au VIème sommet Union-européenne-Union africaine qui s’est tenu à Bruxelles, capitale de la Belgique et de l’UE.
Restituant les grandes lignes de ce sommet, où il a défendu les intérêts de son pays dans les domaines de la sécurité, de la santé et de la lutte contre le réchauffement climatique, le Premier ministre s’est réjoui dans les médias de la performance de la RDC qui « s’est montrée aujourd’hui parmi les économies les plus résilientes avec un taux de croissance de plus de 6% ». Et de souligner « qu’il y a trop peu de pays, qui, dans le cadre de la pandémie, ont connu une stabilité, une croissance économique comme celle de la République démocratique du Congo ».
Sans vouloir m’inscrire en faux contre la déclaration du Premier ministre, je ne peux m’empêcher de relever que cette croissance n’est pas perceptible dans l’assiette des Congolais. Ces derniers continuent à voir le « sachet » de la ménagère se rétrécir davantage en dépit du fait que le gouvernement avait promis de réduire le prix des produits surgelés. Il suffit de faire un tour dans les marchés de Kinshasa pour s’en rendre compte.
Cette croissance ne semble pas non plus avoir impacté le pouvoir d’achat qui demeure précaire sinon inexistant. En tournée dans le Grand Kasaï, le Président Félix Tshisekedi a dû s’en rendre compte, la misère continue à dicter sa loi dans cette partie du pays et cette situation concerne tout le Congo profond.
L’image qui avait fait le tour des réseaux sociaux qui montrait la Jeep 4x4 du Chef de l’Etat embourbée, entre Mbuji-Mayi et Kabinda, suite au mauvais état de la route devrait interpeller Sama Lukonde. Cette réalité doit l’inviter à retrousser les manches au lieu de se réjouir trop tôt d’une croissance jusque-là théorique.
Point n’est besoin d’être économiste pour constater que malgré l’amélioration de cette croissance, les ilots de la pauvreté sur le territoire national ont encore de beaux jours. Selon une étude de la Banque mondiale du mois de juin 2016, l’incidence de la pauvreté en RDC pendant cette période était de 60% dans la plupart des régions. La forte incidence se situait dans les régions du centre et du nord-ouest. Cette situation demeure la même, six ans après la publication de ce rapport.
Bon nombre d’analystes espèrent que le programme de développement à la base de 145 territoires lancé par le gouvernement pourra renverser la tendance. Mais là encore, le défi est réel en termes de bonne gouvernance, si on considère la propension de nos dirigeants à verser dans le détournement et la corruption. Un comportement qui est devenu un sport national.
Théodore Ngangu